Il a dû s'y résoudre, sous la contrainte et la contrainte. Il a envisagé initialement de persévérer de sa propre initiative. Il a finalement renoncé à cette idée. Comme d'autres avant lui, Franck Haise a longtemps hésité à demeurer dans les tribunes lors des matches du RC Lens. Car la perspective y est bien plus propice à l'analyse du jeu et à la prise de décision. Cependant, certains inconvénients demeurent trop prégnants. Les meilleurs entraîneurs sont ceux qui saisissent chaque opportunité, dit-on. Ainsi, lorsqu'il a été sanctionné de quatre matches de suspension - dont un avec sursis - après son expulsion lors du match contre Monaco en Coupe de France, Franck Haise n'a pas considéré cela uniquement comme une punition. Contraint d'assister aux matches de son équipe depuis les tribunes, l'entraîneur lensois a un temps songé à prolonger cette expérience.
"L’obligation d’aller en tribune s’est révélée très enrichissante", avait-il confié avant un déplacement à Nantes. "Je réfléchis à la possibilité de rester en hauteur, même sans être suspendu, au moins lors de la première période." L'idée du coach du Racing était fondée : "En étant à distance, la perspective est bien meilleure, et cela permet une analyse plus fine du jeu et du match", avait-il expliqué. "Cela permet d'établir une distance émotionnelle plus conséquente." Le technicien de 52 ans n'est pas le premier à constater cela. À l'époque où il était entraîneur du FC Nantes, Raynald Denoueix avait déjà tenté cette approche de manière sporadique. "Je me souviens qu'un jour lors d'un match amical à Concarneau, je me suis placé derrière notre but sur un monticule de terre d'une quinzaine de mètres de haut afin d'analyser les déplacements latéraux de mon équipe et de vérifier si toutes les consignes de jeu avaient été respectées", raconte-t-il. "Cela change tout."
Paradoxalement, la perspective la plus éloignée est parfois celle qui offre le plus de précision. "Il y a tant d'éléments à prendre en compte lors d'un match", insiste celui qui a également entraîné la Real Sociedad. "Par exemple, sur une action où un joueur se trouve à 50 mètres du ballon, son positionnement peut devenir crucial deux secondes plus tard." Le gain de temps est également précieux : "Avec l'intensité et la pression du match, il est impossible d'analyser la position des 22 joueurs sur le bord du terrain", reconnaît-il. "Nous n'avons pas de smartphone dans le cerveau... Avec une perspective en hauteur, une animation particulière comme celle d'un Oleksandr Zinchenko, qui commence sur le côté gauche de la défense mais glisse vers l'intérieur lorsque son équipe a le ballon, est mieux comprise." C'est pourquoi certains entraîneurs, comme Luis Enrique, utilisent des élévateurs lors des entraînements.
Lors de son analyse, Franck Haise a toujours exclu la possibilité d'assister à l'intégralité du match depuis les tribunes. Pour lui, les enjeux de la première et de la deuxième période d'une rencontre sont totalement différents. "En seconde période, il faut être très réactif", a-t-il souligné la semaine dernière. "Et la communication n'est pas toujours optimale..." Il s'est ainsi inspiré de la pratique de Sir Alex Ferguson pendant de nombreuses années à Manchester United. À Old Trafford, l'Écossais était assis en hauteur et avait même fait surélever son siège. À l'extérieur, le légendaire manager des Red Devils envoyait parfois certains de ses adjoints très haut dans les tribunes pour surveiller certains détails tactiques. "L'une des choses les plus difficiles que j'ai rencontrées en tant qu'entraîneur (et il y en a eu beaucoup) était de lire le jeu en étant au même niveau que les joueurs", a raconté Gary Neville, qui a passé toute sa carrière à Manchester United avant de connaître une première expérience d'entraîneur délicate à Valence.
"Il y a des entraîneurs qui effectuent des changements qui nous font penser : 'Mais pourquoi font-ils ça ?', a-t-il ajouté. Je suis convaincu que c'est parce qu'ils ne voient pas correctement le match. La plupart du temps, au bord du terrain, vous ne voyez que les jambes et les corps. Mais vous ne percevez pas réellement ce qui se passe." Finalement, Franck Haise a fait marche arrière. Car les bénéfices ne justifient pas toujours les sacrifices. "Il y a des avantages et des inconvénients dans les deux situations", a-t-il justifié. "Lorsqu'on est en tribunes, l'inconvénient est de ne pas être proche des joueurs. J'ai vécu cela à Nantes vers la fin de la première période. Je ne dis pas que cela aurait changé quelque chose mais en tout cas, on peut avoir le sentiment d'être un peu impuissant." Ses joueurs ont ressenti la même chose lorsqu'ils étaient en difficulté sur la pelouse de la Beaujoire. "Nous avons rencontré quelques problèmes qu'il aurait pu résoudre plus rapidement en étant au bord du terrain", a insisté Florian Sotoca. "Il faut pouvoir réagir rapidement", a précisé Haise. "J'ai attendu la mi-temps pour le faire mais parfois, la mi-temps est trop tardive."
Après avoir discuté avec certains de ses cadres - dont Sotoca - et les membres de son staff, le technicien du RCL a décidé de revenir définitivement sur le banc de touche : "Cela arrivera peut-être un jour, mais pour l'instant, nous ne sommes pas prêts, ni les uns ni les autres, à prendre de la hauteur", a-t-il constaté. "Même si j'ai apprécié certains aspects. Pas tous. Notamment en ce qui concerne l'émotion et la réactivité." En attendant, Haise et son staff continueront d'utiliser un outil qui a largement envahi les bancs des clubs : l'écran, pour visionner et analyser des séquences de manière quasi instantanée.